La dispute en couple impacte-t-elle son bonheur ?

Est-elle inévitable ou nécessaire ? Bénéfique ?

La plupart du temps, c’est ma femme qui se dispute avec moi. C’est très rarement l’inverse ! 

Cette phrase peut porter à sourire. Pourtant, même si elle est formulée autrement elle revient de temps en temps dans des échanges d’accompagnements. C’est une manière assez proche de donner l’impression que le départ de la dispute est ailleurs que chez vous ou que la cause est chez votre conjoint. Il ou elle se dispute avec vous parce qu’il ou elle fonctionne mal. Il ne voit pas les choses comme il serait mieux de les voir. Ou, tout simplement, c’est à cause de son caractère. Pourquoi le couple de dispute, finalement ? C’est bien là la question. parce qu’en réalité, le motif et la cause de la dispute peuvent être aussi éloigné que le pôle sud l’est du pôle nord. 

Les sujets de disputes

  • « Il n’arrête pas de me faire des reproches et je n’en peu plus. Rien de ce que je fais ne lui va »
  • « J’ai beau lui demander de faire attention à ce que je lui demande, et elle fait comme si je n’avais rien dis »
  • « Je lui demande simplement de sortir les poubelles et il n’est pas capable de la faire »
  • « Baisser l’abattant des toilettes n’a rien de sorcier ! Pourtant, il ne sait pas faire ! « 
  • « Comment une femme peut-elle oublier d’aller chercher ses gosses à l’école à l’heure ? Ou de préparer le diner ? Vous ne trouvez pas qu’il y a un os ? »

Je ne vous ai donné que 5 exemples pour ne pas vous inonder mais je sais que vous en connaissez des dizaines, voire des centaines. Quand il est question de disputes, votre liste peut se dresser en 44 millisecondes et contenir une somme assez sérieuses de sujets. 

Et si je vous disais que votre démarche est dommageable pour votre couple ? Qu’à cela j’ajoutais que votre lecture de la dispute est faussée ? Qu’en penseriez-vous ? Je vous laisse quelques secondes pour réfléchir à votre réponse, avant de poursuivre. Car, en réalité, la liste des sujets de disputes ne vous avance à rien. Peut-être pourriez-vous prendre le temps d’écrire l’ensemble des sujets de dispute dans votre tête ou sur une feuille de papier avant de prendre le temps de la déchirer. Que cette démarche soit faite sur le plan symbolique ou réel, avec une vraie feuille de papier, je vous invite à le faire. Déchirez-la. Pourquoi donc ? Parce qu’il est fort à parier que les raisons pour lesquelles vous vous disputez ne figurent pas sur votre liste. 

La cause de la dispute

Pour avancer dans ce domaine de la dispute, je vous invite à ne pas confondre les sujets de dispute et la cause de vos disputes. C’est très souvent le lieu de bien des confusions. Et si vous vous souvenez des exemples que j’ai mentionnés tout à l’heure, il ne ’s’agit que de sujets de disputes. Quand vous vous disputez parce que vous n’êtes pas d’accord sur la destination de vos vacances, il s’agit d’un sujet, pas de la cause. Savoir si vous invitez votre mère à votre énième soirée pour garder vos enfants ou si vous payer les services d’une nounou n’est pas une cause mais un sujet de dispute. C’est la même chose pour le choix de la couleur de la peinture de la chambre, le choix du canapé, le menu des enfants ou l’indifférence de votre conjoint à certains de vos besoins. 

Quelle différence y a-t-il entre une cause et un sujet ? 

Commençons par le sujet. Il touche à la surface. Il est donc question de détails qui revêtent de l’importance pour l’autre mais qui peut évoluer au fil du temps. Cette liste de sujets pourrait être assimilée à la partie visible de l’iceberg. Vous et votre conjoint la connaissez presque par coeur. Tout ce qu’elle contient est très accessible, je dirais même, volatil. De cette liste, certains points fluctueront en fonction de votre humeur, par exemple. 

Quand à la cause, elle touche à votre identité, à qui vous êtes, et par conséquent, à la raison pour laquelle vous avez dans telle ou telle direction de vie. Sa connexion avec vos valeurs rend votre réalité rarement souple. Il va de soi que l’ancrage dans les valeurs génère une bien moindre flexibilité. Cette liste de causes pourrait être assimilée à la partie immergée de l’iceberg. Par conséquent, il s’agit de parties de vous-même illisibles par votre conjoint et dont une grande partie est également illisibles par vous-même. Quoi que vous viviez, ces éléments resteront fermes, quasiment immuables. 

C’est des causes dont parle John et Julie Gottman quant ils qualifient certains problèmes d’insolubles. Le simple fait d’intégrer cette réalité implique que certaines disputes seront, de fait, inutiles. Vous saurez d’avance qu’aller sur certains terrains vous conduira vers une impasse. 

La dernière fois que ma femme et moi avons abordé le début d’une dispute sur une cause, nous nous sommes souvenus qu’il s’agissait d’un problème insoluble. Sachant que nous étions entrain d’entrer dans une impasse, nous avons fait demi-tour. Ni elle ni moi n’avions la capacité d’apporter un changement aidant pour le couple. C’était perdu d’avance.

Certains trouvent cette approche négative. Pourtant, à rien y regarder, elle est éminemment positive. Adopter cette approche consiste à reconnaître que l’autre ne pourra pas correspondre à tout ce que je voudrais voir chez une personne que j’aime, et vice et versa. J’accepte donc de l’aimer « en l’état », si je puis me permettre l’expression. Sans rien attendre d’elle dans ce domaine. 

Quelque part, c’est déjà une première étape qui consiste à opter pour une dynamique positive dans une situation qui prenait une direction négative. 

La dispute en couple et le bonheur

Adopter une posture positive

Yvon Dallaire, Psychologue-Sexologue, a étudié les couples et explique que c’est la façon dont un couple se dispute, et non la façon dont un couple s’aime, qui influence son bonheur et sa durée. Son regard est hyper positif. Il voit la dispute comme nécessaire à la construction du couple. 

Les personnes qui ont lu cet article ont aussi lu :   La tendresse accueille la peur

Livre de Yvon Dallaire « Cartographie d’une dispute de couple : Le secret des couples heureux » (Lien Amazon)

Adopter une posture positive est un exercice très très difficile à vivre. Cela dit, sachant que certains d’entre vous travaillent sur eux-mêmes et sur leur couple depuis des mois, voire des années, je vous le propose quand même en me disant que cet exercice peut vous servir. Quoi qu’il en soit, même s’il vous parait trop difficile au présent, qui sait ? Peut-être que dans quelques semaines ou quelques mois vous le vivrez de manière apaisée en profitant de son efficacité. 

L’exercice consiste à vivre deux situations en même temps. Il implique que vous soyez en mesure d’être dans votre échange tendu tout en vous regardant vivre l’échange de l’extérieur. Pour visualiser la scène, imaginez que vous être en pleine dispute de couple. Votre conjoint vous répond et vous sentez que « ça commence à monter ». Hop ! Visualisez alors une sorte de doublure de vous-même que vous placez sur une chaise haute, comme un observateur. Quelle sera son rôle ? 

Il aura à entendre et voir ce qui se dit sans jugement. Vous, en bas, pouvez être très impliqué(e) dans l’échange. Quant à lui, il ne peut pas l’être. Il doit (et j’utilise sciemment le verbe devoir), il doit rester neutre. Ne noter que les faits, les dires et les vouloir-dires. 

Quand vous arriverez à vivre ce double rôle, vous pourrez sortir de « J’ai raison… il a tord ». J’y reviendrai dans un instant. Et surtout, vous pourrez chercher à corréler votre dispute en couple à la cause de votre dispute, dépassant les sujets de détail.

Enfin, plus vous le ferez et moins vous aurez besoin de vous dédoubler pour votre prise de hauteur. Vous percevrez de plus en plus tôt, les causes de dispute en couple. Grâce à cette approche, vous saurez s’il est pertinent de poursuivre ou d’arrêter l’échange. 

La dispute appelle systématiquement au changement 

Changement n°1 : N’abordez pas la dispute en couple en terme « j’ai raison, il a tord ».

Notez que la direction peut changer en fonction de votre humeur ou de votre tempérament. Certaines disputes peuvent voir s’inverser le sens de ce premier changement. Il peut alors être « J’ai tord, il a raison ». Ceci étant, quelle que soit la direction de la posture mentale, elle se base sur un travers. En effet, se positionner sur tord et raison ne permet pas au couple d’avancer. La dispute en couple doit dépasser ce paradigme pour devenir une rencontre bénéfique. Personne n’aime avoir tord. Il faut beaucoup de maturité, ou utiliser le fait d’avoir tord comme une stratégie, pour bien le vivre. Par conséquent, éviter de penser en terme « tord-raison » est une voie bénéfique par le couple. C’est donc le premier changement auquel je vous invite. 

Changement n°2 : Ne convoquer aucune dispute passée dans la dispute présente.

Imaginez une date de péremption sur un conflits peut peut-être vous aider. Du coup, en allant chercher à faire des connections avec des conflits antérieures , vous pouvez envenimer le conflit présent sans aider à la solution. C’est un jeu auquel les journalistes s’adonnent facilement. « Quelques semaines après le casse de la banque de tel endroit, dans le Nord de la France, un boulanger a été cambriolé en Alsace ». Ce n’est pas un fait réel mais c’est juste une illustration que j’utilise pour vous montrer la tactique journalistique. Il n’y a sans doute aucun lien entre ces deux événements. Mais le lien est fait. C’est une manière d’amplifier l’événement présent. Sachez qu’en imitant la technique de ces médias, vous amplifierez artificiellement le conflit présent. 

C’est pourquoi je vous encourage à ne traiter les conflits que les uns après les autres. Tout ce qui n’a rien à faire ici et maintenant sera convoqué plus tard. Et, mieux encore, il le sera en période non conflictuelle. Evidemment ! On voit bien mieux les choses la tête froide. 

Changement n°3 : Cherchez à atteindre un objectif conjugal.

Qu’il laisse trainer son linge sale, qu’elle prenne trois plombes à se maquiller, qu’il caresse plus la voiture que sa femme ou qu’elle passe plus de temps à parler avec sa mère qu’avec vous ne peut se résoudre sans ce changement. Quel est votre projet de couple ? Où allez-vous ? Pourquoi y aller-vous ? 

Il arrive que la répétition des disputes en couple soit le révélateur de couples qui ne savent plus où ils vont ! Ils tournent en rond et s’abiment à force de ne plus avancer. Il est aussi possible que l’un ou l’autre se sentent tellement malheureux qu’il cherche à le faire savoir à l’autre. Ce sentiment de mal-être peut être pleinement inconscient. Il est donc difficile d’y mettre des mots. 

Reprendre le temps de regarder la direction du couple peut donc vous aider. Vous pourrez alors revenir à une collaboration pleine de sens. Cela n’est pas à considérer comme une solution anti-dispute. C’est plutôt une solution permettant de vivre la dispute avec un paradigme plus sein. Il permet de voir le conflit comme un outil aidant à la construction du couple. Un parmi tant d’autres. 

Changement n°4 : Régler les disputes ou donner du sens à votre conjugalité.

Ce quatrième changement est assez proche du changement numéro 3. Il soulève une nuance qui est présente dans le verbe « régler ». Si vous m’écoutez depuis un moment, vous savez que j’aime le verbe connaître qui signifie, « naitre avec ». Or, il est tout à fait pertinent, ici , de le convoquer. Car la dispute est l’occasion rêvée de regarder les choses autrement. Et, avant tout, de se regarder soi, autrement. 

En effet, votre évolution personnelle, voire manière de penser et tant d’autres données qui font que vous êtes qui vous êtes au moment de la dispute font que cette dispute a lieu. Elle n’aurait pas pu avoir lieu quelques semaines ou années plus tôt. Elle peut donc servir à vous révéler, en partie, bien de choses intéressantes sur vous. 

De plus, vous pouvez vivre la dispute sans intention de régler un « problème » mais plutôt en visant à apprendre à naître avec soi. Evidemment, l’autre membre du couple deviendra une occasion de grandir. 

Changement n°5 : La première et la seule personne que vous pouvez changer c’est vous.

N’imaginez pas un instant que je ne sois pas conscient de la portée de cette affirmation. Il m’arrive encore de penser que ma femme devrait changer. Je reste convaincu de cela à l’heure à laquelle je vous parle. Je ne sais même pas s’il est possible que cette pensée me quitte un jour. Mais quoi qu’il en soit, je ne pourrais jamais changer ma femme. Je n’arrive déjà pas à opérer en moi les changements que je voudrais voir, imaginez le chantier sur quelqu’un duquel je n’ai pas le contrôle ! 

Cette logique suffit, à elle seule, pour déterminer que le changement est à faire en vous. De plus, l’amour impose le respect du choix de l’autre. Je le suis arrêté sur ce sujet dans une émission intitulé « changer votre conjoint » La manipulation est également exclue en amour. Il ne reste que l’acceptation. 

Je vous encourage donc à changer vous-même. Je vous en ait adressé quatre changements possibles, juste à l’instant, avant d’ajouter ce cinquième présent changement : La première et la seule personne que vous pouvez changer c’est vous. Même si vous n’êtes pas d’accord avec cette affirmation, sachez qu’elle est véridique. 

Maintenant, quelle alternative à la dispute qui fait mal ? Je m’engage à aborder ce sujet la semaine prochaine. Promis !


POUR ALLER PLUS LOIN :

Psychologie magazine : Pourquoi avons-nous toujours les mêmes disputes ?

Entretien vidéo de Yvon Dallaire « Décider d’être heureux malgré les conflits »

Photo de Dương Nhân provenant de Pexels

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